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ENTREPRENDRE AVEC FIERTÉ

Projet PRODIVERSIDAD – Équateur

L’Équateur a vu le nombre de personnes migrantes et réfugiées exploser depuis le début de la crise sociale et politique au Venezuela. En 2022, c’est plus d’un demi-million de personnes qui sont entrées dans le pays, dont au moins 18’000 migrant·e·x·s LGBTIQ+. Des études estiment qu’un bon tiers sont sans emploi, victimes de multiples discriminations liées à leur statut migratoire et à leur orientation sexuelle ou identité de genre. Le projet ProDiversidad de l’ONG équatorienne Diálogo Diverso, soutenu par PRISMI, favorise l’autonomisation de personnes LGBTIQ + migrantes et équatoriennes. 

Nous avons rencontré l’une d’entre elles, Siri Duque Aconcha, qui nous a parlé de son business et de son parcours personnel.

Rédaction: A.Tsingos

Salut Siri, peux-tu te présenter et parler de ton entreprise aux ami·e·x·s de PRISMI ?

¡Hola ! Je suis une femme trans* vénézuélienne. J’ai émigré en 2018 avec ma sœur et ma mère dans l’espoir d’un meilleur avenir. Lorsque la pandémie s’est invitée dans nos vies, je n’avais pas de travail et pas d’argent. Passionnée de bus depuis petite, j’ai rencontré Juan dans une rencontre de bus miniatures, on s’est bien entendu et on a décidé de travailler ensemble. J’ai commencé comme vendeuse et chargée des relations sur les réseaux sociaux, puis au fil des mois nous nous sommes associés. Aujourd’hui, nous construisons des bus miniatures et les vendons. La clientèle nous passe des commandes très spécifiques et lorsque nous fournissons le produit fini, on voit la nostalgie dans leurs yeux et la reconnaissance, c’est une grande source de motivation. En quatre ans, grâce à divers soutiens dont celui de ProDiversidad, notre entreprise a grandi et nous supervisons désormais une équipe de trois artisans et d’un dessinateur.  En une semaine, nous construisons jusqu’à 30 maquettes de bus et nous recevons désormais des commandes de l’étranger aussi (Mexique, Vénézuela, Espagne, Etats-Unis). Nous travaillons beaucoup et c’est difficile, mais notre entreprise est notre seule source de revenus et nous arrivons à nous en sortir. Je pense que le projet ProDiversidad va nous aider à renforcer notre entreprise.

Quelles sont les difficultés auxquelles tu as été confrontée comme femme trans* immigrée ?

La discrimination que je subis en tant que Vénézuelienne est bien présente, même si elle est latente. Je reçois aussi des remarques transphobes mais je ne laisse rien passer. Diálogo Diverso m’a accompagné dans ma transition (accès aux bloqueurs hormonaux p.ex.) et dans les aspects administratifs en lien avec le séjour. Grâce aux divers soutiens que j’ai trouvé en Equateur, je peux me projeter ici et je rêve de créer un jour une compagnie de bus intercités inclusive.

 

(suite de l’article plus bas…)

Siri est passionnée du bus depuis petite. Son entreprise produit aujourd’hui jusqu’à 30 maquettes de bus par semaine, et emploie quatre personnes.  

Jorge Idrovo est employé de Diálogo Diverso et nous décrit plus en détail le projet ProDiversidad.

¡Hola Jorge! Peux-tu décrire le projet aux ami·e·x·s de PRISMI et dans quelle étape on se trouve ?

¡Hola ! Avec plaisir. La phase 2 du projet a démarré en février, avec un travail de sélection d’entrepreneur·e·x·s ayant déjà bénéficié d’un accompagnement de base pour le lancement de leur entreprise (phase 1) et qui nécessitent un renforcement institutionnel. Parmi les entreprises qui ont de bonnes chances de se développer, on en invite 40 pour cette phase 2 et on estime que 30 répondront présentes. Cette phase du projet offre un diagnostic, une formation et un mentorat personnalisé. La formation abordera les domaines de la comptabilité, des finances, de la fiscalité et du droit du travail. Elle débute dans la deuxième moitié d’avril et dure trois mois, à raison de sept heures de cours par semaines.

Une fois ces connaissances approfondies acquises, des entrepreneur·e·x·s LGBTIQ+ de la place offrent un mentorat. Iels partagent leurs conseils et leurs expériences, on est dans le concret. Le but est notamment que ces petites entreprises améliorent leur image, en communiquant mieux sur leurs produits via les réseaux sociaux par exemple.  Enfin, on veut encourager la mise en réseau des petits commerces LGBTIQ+ en créant deux points de vente, un à Quito et un à Cuenca, l’idée étant que chacun·e·x se fournisse au sein du réseau et qu’on accélère ainsi l’atteinte de l’objectif, qui est l’autonomie financière.

Qui sont les bénéficiaires du projet ?

On compte environ un tiers de personnes équatoriennes et le reste sont des personnes issues de la migration. En moyenne, les personnes ont entre 30 et 45 ans et on atteint presque la parité. Elles ont développé un business, par exemple dans le maquillage, les impressions digitales, l’organisation d’événements, la coiffure, la lingerie ou la vente de jeux. Le profil typique des personnes équatoriennes ? La plupart vivent avec moins que le salaire minimum. Elles peuvent avoir subi un fort rejet familial en raison de leur orientation sexuelle ou identité de genre. Victimes de discriminations, plusieurs d’entre elles ont une basse estime d’elles-mêmes, ressentent un stress chronique et sont parfois dépressives. En conséquence, elles ont de la difficulté à s’insérer professionnellement.

Les personnes du projet d’origine étrangère ont émigré du Venezuela et dans une moindre mesure de Colombie. Elles subissent du racisme, en plus de l’homo- ou transphobie. Le discours politique tend à les pointer comme responsables de l’insécurité grandissante dans le pays. Beaucoup de commerçant·e·x·s originaires du Venezuela ont essentiellement des client·e·x·s compatriotes, le but est de faire tomber cette barrière xénophobe et que les Equatorien·ne·x·s se fournissent aussi chez elleux.

Et si nous terminions cet entretien sur une note positive ?

¡Claro ! Je peux partager le nombre de personnes qui ont bénéficié du projet ProDiversidad: si on ne compte que les bénéficiaires direct·e·x·s, c’est près de 160 personnes qu’on a accompagnées vers l’autonomie financière depuis 2021. Si on y ajoute les proches des entrepreneur·e·x·s, on atteint plus de 630 personnes qui ont amélioré leurs moyens de subsistance et, par effet de ricochet, leur résilience.

 

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